Comment gérer son patron quand il semble à côté de la plaque et joue mal ou insuffisamment son rôle ? Pour rétablir le contact, il faut oublier ses problèmes d'ego tout en ménageant l'intérêt commun. Pas facile ?
Personne n'étant parfait, le patron idéal n'existe pas. Il reste cet individu qui peut, sous la pression, se laisser emporter par un excès de certitudes au risque de déstabiliser son équipe.
Pour protéger l'équilibre qui fait les entreprises heureuses, on est parfois amené à renverser les rôles et à manager son manager, même si la gestion du boss doit être maniée avec précaution et modération. Il ne doit pas laisser s'installer l'idée que la hiérarchie est une notion à géométrie variable, auquel cas le remède risquerait de se révéler pire que le mal.
On commencera par rappeler au chef abusif que le rapport professionnel n'est jamais qu'une variante du rapport humain standard. Le manager doit comprendre que l'existence d'un lien hiérarchique ne supprime pas la notion de parité entre les individus. Chacun à s'en doute intérêt à intégrer l'idée qu'il est coresponsable de la relation qu'il va créer. Dès le moment où le discours de bon sens n'est plus accessible aux personnes, le rapport de parité est détruit et il peut être nécessaire de recourir à une intervention, que ce soit une médiation ou un coaching individuel.
Trouver les racines du mal:
Si des collaborateurs se sentent méprisés par leur hiérarchie, le risque est qu'ils tombent dans une logique du complot. Adieu atmosphère paisible, bonjour les résultats qui baissent. Il s'agit de remettre les choses à plat afin d'éviter que chacun soit tenté de privilégier la "lecture de pensée", un système qui a pour résultat de diaboliser le moindre geste patronal.
Exemple pour dénouer une situation de ce type :
Un salarié se plaignait de devoir affronter l'agressivité de sa supérieure hiérarchique à chaque réunion. Au départ, le travail a consisté à vérifier que c'était bien avec lui que la responsable était agressive. En fait, ce comportement s'adressait à toutes les personnes de son équipe présentes auxréunions. Ensuite, le salarié a pris du reul et fait le tri entre les remarques réellement humiliantes et celles qu'il percevait comme telles. Il a finalement établi que, sur dix d'entre elles, seules deux l'humiliaient réellement. Au passage, faire vérifier aux interlocuteurs une fois de plus de la nécessité de sensibiliser chacun à la coresponsabilité de la relation. Ensuite, les échanges entre les deux parties ont permis d'itendifier que l'agressivité du manageur était davantage une manifestation de peur. A partir de toutes ces données, ils ont pu élaborer une solution : il suffisait - afin d'éviter toute surprise - que les sujets qui pouvaient faire peur au manager soient préparés et traités avant la réunion et non pendant la réunion.
L'art de (meta) communiquer:
Poser la question permet de s'assurer que le managé n'est pas entré dans une sorte de jeu psychologique. Le salarié doit analyser sa relation avec son manager : est-ce une histoire qu'il est seul à vivre, ou encore une histoire qu'il se raconte ? L'attitude de son manager lui pose-t-elle réellement problème ? Ont-elles des conséquences sur son travail ?
Comment éviter de s'auto-piéger, de s'enfermer dns de fausses certitudes, de ruminer dans son coin, de guetter le moindre détail qui semble conforter le sentiment d'être maltraité ou tenu à l'écart ? Il faut mé-ta-com-mu-ni-quer, c'est à dire communiquer sur la relation établie avec son chef. Surtout pas sur le contenu du travail. Dans une situation tendue, chacun a tendance à vouloir se justifier. Mieux vaut toujours se méfier de la représentation qu'on se fait d'un problème.
Ce sont peut-être des éléments isolés qui ont chacun une explication et n'ont aucune raison d'être reliés entre eux. On tombe vite dans le dialogue de sourd. manager comme managé campent leur vision du monde. Pour sortir de l'impasse, il faut parler de l'avenir, du projet, pas du passé. Qu'avons-nous envie de continuer ensemble ?
Changer la relation :
La gestion du non-dit est capitale, car elle seule permet de déterminer si on a affaire à un simple malentendu.
Exemple:
Pierre, gestionnaire dans le secteur grande distribution depuis trois ans, ne supporte plus que son boss refuse de lui confier des missions stratégiques : "Mon N+1 se méfie de moi, mais aussi des autres collaborateurs du service. Il veut être le seul à avoir une vision globale, c'est pour cela qu'il divise les tâches", estime-t-il. Cette impression négative est liée à une mauvaise approche de la situation. Dans un premier temps, Pierre ne doit pas s'attacher à la rigidité de son boss : après tout, "avoir une vision globale" fait partie des prérogatives d'un responsable. Ensuite, il devrait repenser son propre mode de communication, apprendre à se montrer manipulateur. Il a un chef qui aime contredire son équipe ? Pourquoi ne pas en jouer en proposant le contraire de ce qu'il veut faire ? Ou cesser de vouloir le convaincre, abonder toujours dans son sens, ne plus rien proposer.
L'idée, c'est de créer du vide, modifier le système pour voir ce que ça donne. Cette stratégie ne vise pas à prouver que l'un ou l'autre a tort ou raison, maus à obtenir que la relation change. Ce n'est pas quelque chose contre la personne, mais pour le système. Plus le managé attribue un comportement figé à son chef, plus il se lie les mains. Le comportement que mon chef a avec moi est le résultat du comportement que j'ai avec lui. Si je veux que le système change, que la relation change, peut-être faut-il changer ma manière de m'adresser à lui.
Un doigt de psychologie, un soupçon de manipulation, un zeste de bonne volonté et cinq volumes d'expertise, voilà le cocktail qui vous permettra de manager votre boss presque à son insu...